Hōshō a réussi. Kaidō Setsuwa a réussi. J'ai réussi. Le mouvement libérateur initié par Mère a finalement porté ses fruits : Yūmin Gaiden n'est plus. En revanche, bien qu'il soit décédé, nous essuyions un déferlement de haine inexplicable. Est-ce sérieusement de cette façon qu'on nous remercie ? Ma volonté d'apporter mon soutien à une cause m'obligea à me séparer de mes parents et mes désirs de libérer les civils du siège Takigakure no Satō causèrent mon désespoir. Exécuter ma mère ainsi que mon père devant mes yeux n'était pas suffisant ? Maintenant, les shinobis du Yūkan désiraient ma tête ? Je ne pouvais pas affirmer avec certitude que Kazangakure no Satō était l'auteur de cette chasse et je ne sais même pas combien coûtait ma vie. Cependant, d'après la détermination des chasseurs de primes, d'après leurs férocités, d'après leurs volontés à ôter la vie de Mère, d'après de nombreux facteurs que j'ai vu, j'imaginais qu'ils doivaient empocher une belle somme. De quoi rendre fou les plus avares d'entre nous. C'est donc dans un contexte de survie que je m'étais réfugié au Pays des Marécages. Retrouveraient-ils ma trace ? Les têtes-brûlées désireux d'aventurer Senjōgahara se comptaient sur les doigts d'une main donc la probabilité frôlait le néant. À vrai dire, je restais quotidiennement sur mes gardes. « L'excès de confiance est un tueur lent et insidieux. » Répétait quotidiennement Père : être en alerte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, voilà la solution à ce problème. Malheureusement, la paranoïa pointait elle-aussi le bout de son nez. Avais-je raison de me méfier de chaque personne que je croisais, d'écouter discrètement les discussions d'honnêtes caravanes que je rencontrais sur un malentendu, de tenir fermement le manche d'un kunaï dissimulé à l'intérieur de ma veste à longueur de journée ? Moi-même j'agissais de manière irrationnelle, les chances de me retrouver ne frôlaient pourtant pas le zéro ? Que devais-je faire ? Me rendre au Pays des Montagnes et rejoindre les portes de la Mort ?
Alors que je m'apprêtais à franchir le pas un beau jour d'hiver, mes pupilles grisâtres se posèrent sur une silhouette anodine au détour d'un chemin réputé pour être épargné par les marécages. Bien que la chevelure verte de cette dernière m'intriguait au plus haut point, je ne pouvais pas m'empêcher de fixer les trois sabres soigneusement attachés à sa ceinture. Drôle d'attirail pour un commerçant propriétaire d'une caravane marchande.
- ↬ Je comprendrais qu'un boutiquier désire se défendre à l'aide d'un sabre, mais trois armes... cela semble disproportionné.
Je souffla un bon coup avant de croiser le regard de mon interlocuteur.
- ↬ Je peux vous indiquer le chemin si vous le désirez. Ajoutais-je avec ironie.
J'avais pleinement conscience de la réalité et j'étais prêt à accepter mon destin. Pourquoi ne pas rejoindre les Cieux avec humour pour une fois ?